11 octobre 2013

CHIEN PASTEUR



  «  Le voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire… » 
                                                                        Jean 10,10

                                             
                                          


Une chose effrayante dévale la montagne en faisant  voler des nuages de poussière. On dirait une fusée poilue aux yeux de braise qui  crache la bave et montre des crocs effrayants.  Elle aboie comme un diable et saute dans les airs cherchant à nous avaler tout rond mon cheval et moi.

Cette chose est un chien pasteur, un chien berger,  qui garde les moutons, les défend, les protège. Qui ne laisse personne approcher du troupeau, pas un loup, pas une belette, personne sauf le berger des moutons. Jamais dans ma vie je n’avais vu bête aussi méchante, mais jamais non plus une bête aussi dévouée à d’autres bêtes.

Pour le transformer ainsi en redoutable défenseur de moutons, le chiot dès sa naissance est enlevé à sa mère et confié à une brebis qui l’allaite comme l’un de ses propres petits. De cette manière le petit chien, sans cesser d’être chien, devient frère des moutons. Sinon de sang du moins de lait. Devenu plus grand, il défend comme sa propre peau la peau de ses frères moutons.

Le Pape a dit aux prêtres : Soyez proches du peuple, proches des pauvres, comme un berger de ses moutons. Arrangez-vous pour sentir le mouton… 

J’ajouterais: inspirons-nous du chien à moutons.

Abandonnons ce modèle de petits professeurs et fonctionnaires de choses saintes sur lequel la plupart des prêtres de notre génération ont été taillés. Il faut changer ce look à tout prix, quoi qu’il en coûte aux Nicodèmes comme moi.

Libérons nos futur(e)s pasteur(e)s et agent(e)s de pastorale de nos anciens moules de type académique et monacal et permettons qu’ils se forment en se frottant aux gens de tous les genres, principalement les pauvres, les petits, les paumés, les exclus.

Qu’ils puisent l’inspiration de leur spiritualité dans ce que les blessés et les marginaux de la société vivent, souffrent et rêvent. Qu’ils se contaminent de leur douleur,  de leur colère et de leurs espoirs.  Que le vaste sous-monde des couches inférieures de la société soit leur monde,  et qu’il se colle à leur peau comme le monde du chien-pasteur à celui des moutons. Qu’ils bâtissent leur théologie à partir de là, au lieu de la recevoir cuite d’avance dans les cloîtres de nos instituts d’église.

Car comment seront-ils témoins de la Bonne Nouvelle de Jésus aux pauvres s’ils ne s’exercent pas à voir le monde avec les yeux du pauvre?

Ces futur(e)s pasteur(e)s doivent à tout prix apprendre à sortir les crocs pour défendre les appauvri-es. Ils doivent être prêts à avaler (avec cheval et tout) l’injustice qui, chaque jour, leur mange un peu plus de laine sur le dos. Ils doivent surtout appendre à détecter la grossière duperie du grand système qui se présente à l’humanité et à la planète comme le remède à tous les maux alors qu’il en est lui-même  la cause première.

Cette histoire de chien-pasteur, bien entendu, n’est qu’une métaphore. Les humains ne sont pas des moutons et le pasteur n’est pas un chien. Jésus, qui a dit « bienheureux les doux », ne verrait sûrement pas d’un bon œil que ses disciples soient transformés en bêtes féroces comme ce chien enragé que j’ai décrit plus haut…

Mais retenons au moins ceci : Jésus et les prophètes, qui ne dédaignaient pas les métaphores et dont le cœur débordait de  compassion et d’amour pour la paix, n’ont jamais eu peur de japper…

Nous aussi nous jappons parfois, mais qui effrayons-nous au juste: les loups dévoreurs de moutons… ou seulement les brebis qui ne bêlent pas comme les autres?

                                                                                                    Eloy Roy


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