20 avril 2012

DU SACRÉ AU RATIONNEL




Beaucoup d’entre nous sont nés en nageant dans le religieux, dans le sacré, dans l’eau bénite jusque par-dessus la tête. La divinité était omniprésente dans les moindres recoins de nos vies. Nous étions pieux, dévots, superstitieux, crédules, dociles, bons enfants. Nous étions mystiques aussi. Nous sublimions tout.

Pour nous, le mal, le désordre, les malheurs venaient du péché. Il fallait combattre le péché en nous, autour de nous et partout, par le sacrifice, la force de volonté, la discipline, la violence même, et aussi par les missions.

Parfois on osait regimber un peu, mais nos révoltes ne faisaient pas long feu. On croyait en un Dieu infiniment bon, mais on croyait aussi qu’on ne méritait rien de sa bonté. Il fallait sans cesse lutter pour se montrer dignes de ses biens. Rien n’était jamais trop beau ni trop grand pour notre Dieu. Aussi, à tous les coins de rue, nous lui élevions des églises sans rien ménager. Et nous lui donnions notre vie sans compter. On entrait dans les ordres religieux à pleines portes et on s’engageait avec ferveur à une vie d’austérité, de prière, de don de soi.

Nous nous estimions chanceux, privilégiés même, de connaître cette voie de salut, qui nous avait été révélée à nous et demeurait cachée aux nations… Aussi, par les missions que nous soutenions généreusement, nous volions jusqu’aux extrémités de la terre partager ce trésor avec la masse des humains qui « gisaient dans les ténèbres et l’ombre de la mort. »

Quand nous étions encore dans la survie, cette vision de la vie était à la fois réconfortante et dure. Nous connaissions les règles. Nous savions à quoi nous en tenir. Nous étions héritiers des joies du ciel pourvu qu’on y mît du sien, qu’on acceptât la réalité qui nous écrasait et qu’on y fît face avec résignation - et- courage. Tout ce qui mettait en question cette façon de voir les choses était mauvais.

Puis tout doucement a émergé la raison. Le développement de l’industrie, de la science, la croissance des villes, les changements sociaux nous ont fait prendre conscience qu’il y avait d’autres façons de voir, de faire, de penser. Qu’on pouvait en quelque sorte être maître de son destin, maître de le forger, de le bâtir. Qu’il y avait peut-être moyen de se libérer de la vie ardue qui nous attachait à la terre et nous forçait à en accepter les lourdes contraintes. On s’est donc ouverts à d’autres façons de voir. L’homme était-il seulement un impuissant, un méchant, un coupable, un instrument du destin, un jouet dans les mains d’un Dieu qui ne lui passait rien ?

On a découvert que nous étions surtout ignorants. On s’est mis à essayer de comprendre et puis à tout expliquer… À tout concilier. À essayer de rendre la religion et Dieu plus raisonnables, plus compréhensibles, plus humains. On a alors redécouvert Jésus comme un être humain et, peu à peu, on a pris en main notre destin.

Les lumières de la raison et de la science qu’on avait toujours plus ou moins méprisées, sont devenues soudain notre salut et Jésus, un compagnon de nos recherches et de nos cheminements. Il n’était plus le Sauveur devant qui on s’agenouillait.

Ce fut un printemps pour la liberté. Un vent de libération a déferlé sur nous. Nous sommes devenus les seuls maîtres de nous-mêmes.

On en est là. Faudrait-il revenir en arrière ? Non. Rester où nous en sommes ?...

                                                                 Eloy Roy

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

  OPTION JOIE! Le monde est à l’envers. Notre planète s’en va chez le diable. Comme lave de volcan des fleuves de sang coulent sur les f...